Un tour dans les Andes Boliviennes
Les adieux à Santa Cruz n'ont pas le temps d'être digérés que je me remets en route, sac au dos, car je dispose de deux semaines et demie avant de rallier Santiago du Chili, ville où j'effectuerai une mission exploratoire de deux semaines auprès de l'ONG locale "Techo" (Toit) pour le compte de mon association en France.
J'ai donc prévu de rejoindre la partie Ouest de la Bolivie, du côté Andin, car elle recèle quelques merveilles...
Mon bus de dix-sept heures de trajet m'emmène à la Paz, la capitale. Mais une fois installé, j'ouvre mon guide de voyage un peu au hasard et tombe sur une page consacrée à Copacabana. Le nom de la ville m'inspire, comme tout un chacun, car il est synonyme de soleil, de plages, et de cocktails sirotés en position avachie. Elle est située à quatre heures de la Paz, en bordure du lac Titicaca. Ni une ni deux, je décide d'y aller directement et de remettre la Paz, où je passerai donc en transit, à plus tard.
Copa, Copacabaaaana
Copacabana est bien sûr le nom d'un quartier de Rio de Janeiro au Brésil, qui donne son nom à la fameuse plage et à la chanson entêtante. Mais la Copacabana de Bolivie est en réalité celle qui a donné son nom à ce quartier Brésilien.
La ville est célèbre pour la vierge noire de Copacabana, installée là par les Espagnols, et noire pour ressembler davantage aux Indiens...C'est ainsi un des nombreux exemples du métissages religieux entre l'Occident Chrétien et les croyances des Andes.
Quoi qu'il en soit, un marin Espagnol, en 1754, alors qu'il était égaré en pleine mer, pria la sainte vierge de Copacabana.
Sauvé des flots, il lui érigea une chapelle à l'endroit où il échoua, cette plage donc du futur Brésil.
J'ai mésestimé les effets de l'altitude. Je suis passé de 400 mètres à 3 800 mètres en moins de vingt-quatre heures, ce qui est beaucoup trop rapide. En résulte une étrange impression, entre souffle court et oppression, et globalement une petite forme...
La ville est petite et sans grand charme, mais elle borde le lac Titicaca, qui est le plus haut lac navigable du monde, et qui couvre 8 500 km².
On peut monter sur le "Cerro Calvario" (Mont du calvaire), pour admirer une superbe vue. Et c'est là qu'un groupe de quatre amis Français me demande de prendre une photo d'eux. Je m'exécute et fais ainsi la connaissance de Camille, Arnaud, Arthur et Gilles, qui ont entre 24 et 26 ans, travaillent à Paris et sont donc en vacances entre le Pérou et la Bolivie. Ils sont très sympathiques et drôles, et vu que nos itinéraires concordent, c'est tout naturellement que je me joins au groupe en qualité de cinquième larron !
Le lendemain, direction la Isla del Sol. Je connaissais déjà le lac Titicaca du côté Péruvien (il est séparé en deux moitiés, chacune située dans l'un des deux pays), mais le retrouver me ravit. Magnifique étendue d'eau douce, avec en toile de fond les Andes, l'atmosphère est enchanteresse.
Sur la Isla del Sol, une rapide visite de ruines incas (des murs de pierre en somme), puis une traversée de l'île du Nord au Sud sur la route appelée pompeusement "la Ruta sagrada de la eternidad del sol", ponctuée par trois (!) péages, nous amène au village de Yumani où nous contemplerons le coucher de soleil et passerons la nuit.
Les photos parleront d'elles-mêmes :
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Les Andes en toile de fond :
Prochaine étape : la Paz la Paz la Paz
L'arrivée depuis el Alto, vers la capitale la plus haute du monde (3 600 mètres d'altitude), est saisissante. Cette vallée haut perchée est tapissée de maison de briques et d'adobe jusque dans ses contreforts.
Nous décidons de passer une journée à la Paz (le timing est serré), Nuestra Senora de la Paz pour les intimes (Notre-Dame de la paix).
Le temps est mauvais, pluvieux et froid, et j'ai au final le sentiment d'être quelque peu "passé à côté " de la ville. Et ce même si nous avons arpenté les rues, qui montent et qui descendent, et vu quelques jolis monuments et maisons coloniales, ainsi qu'une fête locale, dimanche oblige.
Une curiosité (en-dehors des affiches trotskistes, 4ème photo), que sont les foetus de lama séchés (6ème photo), qu'il convient d'enterrer là où l'on entreprend de construire sa maison, pour assurer prosperité et protection de Pachamama (la terre-mère), et que l'on peut trouver notamment au coeur du marché des sorcières.
Un bus de nuit frigorifié et nous voici à Potosi. La ville est célèbre pour sa mine d'argent, qui selon la légende aurait rapporté tant d'argent aux Espagnols qu'ils auraient pu construire un gigantesque pont entre la Bolivie et l'Espagne avec le précieux métal extirpé des flancs du "Cerro Rico" (le mont riche ou richemont).
Il faut croire qu'à travers le temps les Espagnols ont géré de façon imparfaite cette providentielle fortune...
La ville, du temps de sa splendeur et jusqu'à l'aube du XIXème siècle, fut l'une des plus grandes villes du monde, aussi peuplée que Londres ou Paris. Seule différence notable, elle est située à très précisément 4 070 mètres d'altitude. De nombreuses familles riches envoyaient une fille au couvent Santa Teresa, que nous visitons le matin.
Tout dans la cité renvoie au temps de son apogée et elle est encore très belle : rues étroites, façades colorées et architecture coloniale… avec en sus une atmosphère agréable, véhiculée par la population locale.
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L'après-midi, place aux choses sérieuses avec la visite des mines. Celle-ci est organisée par une coopérative de mineurs, qui nous emmène tout d'abord nous changer : veste, pantalon, bottes et casque avec lampe frontale.
Ensuite, notre guide, ancien mineur lui-même, nous emmène acheter quelques présents pour les mineurs, une tradition ici. On peut acheter des feuilles de coca, des boissons, du matériel scolaire pour leurs enfants ou des batons de dynamite...En bon pacifiste, j'achète des cahiers et des stylos. Ainsi, s'il y a un incident dans une galerie qui s'effondrerait, ma conscience restera en paix.
La vue du cerro Rico depuis la ville :
Un petit arrêt à l'usine de transformation de minerai :
Puis vient la mine. Notre guide nous fait pénétrer dans un orifice sombre où il faut se courber pour avancer. Au début il fait vraiment frois à cause des courants d'air, mais très vite la chaleur et le manque d'oxygène se font sentir. Nous avançons au pas de charge dans une atmosphère suffocante, un bandana sur la bouche.
Nous continuons de loin en loin, parfois à quatre pattes, et sur une portion de dix mètres nous nous voyons forcés de ramper. Un moment d'hésitation survient, mais on a pas vraiment le choix. Claustrophobes s'abstenir !
Au bout d’un moment, au croisement de galeries, nous rencontrons un groupe de mineurs. Il fait ici dans les 35 degrés et ils travaillent torses nus. Nous leur remettons les cadeaux qui ne semblent pas les émouvoir plus que cela (probablement car il ne s'y troyuve pas de dynamite). Nous leur donnons un coup de main bien ridicule en ramassant des pierres avec une pelle ou en transportant des sacs extrêmement lourds. Cela nous donne un bon aperçu de leurs conditions de travail, qui n'ont pas beaucoup évolué depuis le XVIème siècle...
Ils travaillent au sein de coopératives, qui sont en fait des petites entreprises qui réunissent de un à à deux cents mineurs : à l’intérieur c’est chacun pour soi, on est payé en fonction de la quantité et la qualité du minerai ramené, à la tonne. Les mineurs ont une espérance de vie réduite, et on estime à huit millions le nombre de personnes mortes dans le Cerro Rico depuis le début de son exploitation. Le salaire moyen de 300 bolivianos la journée, est très bon pour la Bolivie, mais le prix en est élevé...
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Une expérience intense et à couper le souffle !
Mais pas le temps de s'attarder à Potosi, car nous attend une des merveilles du mondes : le Salar d'Uyuni.
Salar d'Uyuni et Sud Lipez
Uynui, point de départ de l'excusion, est une petite ville de 10 000 habitants situe à trois heures de bus de Potosi. Tout droit sortie du far-west, elle a pour activité essentielle l'organisation des tours du Salar et de la région du Sud-Lipez. En plus des agences, les hotels onéreux et les pizzerias pullulent, dans une ambiance de ville de passage.
Nous choisissons le tour très classique de trois jours et deux nuits, comme la nuée de touristes qui se pressent dans la contrée.
A quelques kilomètres du village d'Uyuni, un cimetière de trains est posé en plein milieu du désert. Ces engins à l'abandon sont des vestiges de l'âge d'or du train à vapeur, aujourd'hui révolu.
Débute ensuite le Salar proprement dit, le désert de sel.
Cette étendue de sel est située à 3 658 m d'altitude. Avec une superficie de 12 500 km2, elle constitue le plus vaste désert de sel du monde et représente un tiers des réserves de lithium exploitables de la planète. Ses dimensions sont de 150 kilomètres sur 100. Sa formation remonte à 10 000 ans, quand l'étendue d'eau salée était une partie du Lago Minchin, un lac préhistorique géant.
Quoi qu'il en soit, c'est l'occasion pour nous de faire des photos saisissantes ou drôles, au choix.
Une pause-déjeuner sur la Isla de los Pescados, hérisée de cactus et de lamas (pauvres bêtes) :
Malgré son statut de sésert, le Salar est très fréquenté. De nombreux 4x4 le sillonnent d'est en ouest, ce qui donne l'impression de visiter un parc d'attractions tant ils charrient de touristes en quête de paysages inouïs.
Nous passons la nuit à l'est du Salar, dans un hôtel de sel (murs et sols), pendant laquelle la température baissera jusqu'à moins cinq environ. Mais les nombreuses couvertures fournies par le refuge atténuent considérablement la morsure du froid.
Le lendemain, cap au Sud, vers la région du Sud Lipez, avec toujours en toile de fond les Andes. Au coeur de l'altiplano la région du sud-ouest de la Bolivie offre un spectacle bariolé de lagunes, volcans et montagnes. A 5 000 mètres d'altitude, cette région désertique est peuplée de flamants, de vigognes et de viscaches (sortes de lapins andins).
Un spectacle varié, enchanteur, où chaque halte nous permet de contempler les merveilles de la nature.
Une laguna :
Des flamants par milliers (enfin par dizaines sur les photos) :
L'incroyable Laguna colorada, de couleur rouge :
La deuxième nuit est plus froide que la précédente, car nous sommes plus hauts en altitude. Du coup, pour nous réchauffer, le dîner se transforme en dégustation massive de vin chilien, partagé avec les occupants des autres groupes qui logent dans le refuge. C'est de plus ma dernière soirée avec les quatre amis, alors ça se fête !
Le lendemain matin à 6H, place aux geysers, qui sont en réalité plutot des fumerolles.
Une baignade dans une source chaude :
Et toujours des paysages superbes :
Vient la dernière lagune, et c'est le temps des adieux. Nous nous trouvons au carrefour des frontières Chiliennes, Argentines et Boliviennes.
Je quitte Camille, Arnaud, Arthur et Gilles pour rejoindre San Pedro de Atacama, derrière le volcan Licancabur (sur les photos), au Chili, tandis qu'eux remontent vers Uyuni en 4x4, les uns rentrant en France et les autres poursuivant vers le Pérou et le Machu Picchu.
Il me reste une semaine pour rejoindre Santiago du Chili, afin d'y mêner ma mission d'enquête. J'ai passé dix jours intenses dans les Andes Boliviennes, bien accompagné par un super groupe, qu'il me peine de quitter. J'ai ainsi pu partager cette superbe expérience avec eux, chaque heure apportant son lot de paysages, de rencontres, de mines, de bus, de jeux de cartes ou de bons dîners !
Les adieux sont le lot des voyages et des missions, et pas leur meilleur aspect. Mais pas la peine de s'appesantir, le Chili m'attend !