Sur la route de Santiago
Me voici arrivé au Chili, via la frontière Bolivienne au Nord. Il me reste une semaine pour rejoindre Santiago où se déroulera ma mission d'investigation pour Développement sans frontières.
Le village situé derrière le volcan Licancabur se nomme San Pedro de Atacama. Un bus d'une heure nous y emmène. Les formalités administratives de rentrée au Chili s'effectuent, grâce notamment à la présence surprenante d'un équipement à rayons X.
San Pedro une charmante bourgade de 3 000 habitants, très touristique car de nombreuses balades et activités sportives sont organisées depuis le lieu. Un constat s'impose rapidement : la vie est au moins deux fois plus chère qu'en Bolivie !
Beaucoup de monde de passage ici donc, notamment des Français qui profitent des congés estivaux en Amérique du Sud. J'en retrouve d'ailleurs trois que j'avais vus dans le Salar d'Uyuni, un couple, Mélie et Yohann, et Alexia, tous internes en médecine à Lyon et qui ont fait un stage épique dans un hôpital de Puno au Pérou.
San Pedro est très agréable sous le soleil et tire son nom de sa proximité avec le désert d'Atacama, un désert de sable cette fois-ci.
Avec mes trois médecins en herbe, nous décidons de louer des VTT pendant deux jours et de partir en vadrouille, munis de pique-niques.
Après quelques kilomètres accompagnés par une meute de chiens désireux de partir en balade, nous nous enfonçons dans le paysage désertique de Catarpe, qui abrite les ruines d'un ancien centre administratif inca.
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Celui-ci se compose à nouveau de murs et ne présente donc que peu d'intérêt...Ce qui n'est pas le cas des paysages, saisissants.
Nous nous arrêtons pour déjeuner près d'une charmante petite église.
Nous arrivons ensuite dans le décor improbable de la Quebrada del diablo (la gorge du diable), un régal en VTT au long d'un étroit sentier qui serpente et s'enfonce dans un dédale silencieux. C'est une sensation très étrange que de s'engouffrer dans ce décor apocalyptique, sans trace d'intervention humaine.
Nous faisons une halte à la Pukara de Quitor, l'un des derners bastions de la résistance régionale contre les Espagnols. Au loin se découpe le volan Licancabur, qui culmine à 5916 mètres.
Nous prenons ensuite le chemin de la Valle de la Muerte, qui mérite bien son nom. Toujours ces paysages rocailleux, de couleur beige ou ocre, creusés à travers les millénaires en dédales parcourus de crevasses et de galeries. Cela donne l'impression de parcourir une autre planète, comme la Lune ou Mars. La vallée de la mort s'appelait d'ailleurs originellement la vallée de Mars. Celle de la Lune sera d'ailleurs au programme de demain.
Je choisis en effet de prendre une excursion de Sand-board (surf des sables), sans les Lyonnais que cela tente moins. C'est une activité-phare de la région du désert d'Atacama. Dans le 4x4, je tombe sur...des Françaises, trois filles de 21 ans en stage au Chili. Direction tout d'abord la vallée de la mort, avec notre instructeur, Jorge.
Le spectacle des roches à moitié recouvertes par le sable est fantastique :
Et c'est parti pour une session de surf. La montée est pénible, car il n'y a pas de tire-fesses, et la descente un peu fastidieuse car cela ne glisse pas très bien, mais on s'amuse. Nous découvrons d'ailleurs que notre instructeur est complètement nul. Quand je lui pose la question, il me répond benoîtement qu'il est davantage chauffeur qu'instructeur. Oui on avait remarqué Jorge.
Après quelques descentes de dunes et remontées, la séance se termine. On est loin des journées complètes de ski mais ce fut une expérience intéressante !
Nous nous rendons ensuite dans la vallée de la Lune, pour une mini-randonnée dans ses méandres, avant de rejoindre un pic rocheux afin d'admirer le coucher du soleil, un verre de Pisco Sour à la main. Jorge est donc chauffeur ET barman.
Le soleil couchant crée une jolie couleur rouge sur les montagnes à l'Est :
J'ai finalement passé quatre jours à San Pedro, ce qui n'était pas du tout prévu, mais la richesse des paysages de la région et la torpeur ambiante m'y ont incité. J'ouvre mon guide pour décider si je vais directement à Santiago ou si j'opère une halte sur le chemin, et décide de me rendre à la Serena, deuxième ville la plus ancienne du pays.
Dix-sept heures de bus et je me rends, avec l'aide de fort serviables Chiliens, à la Maria's casa, charmante pension de famille tenue par Maria une Chilienne âgée et sourde d'oreille.
Une petite visite de la Serena, qui se situe à quinze minutes du Pacifique, me laisse découvrir une ville de province paisible, articulée autour de la traditionnelle Plaza de armas. Le ciel est recouvert de nuages gris foncés, ce qui est semble-t-il très habituel ici.
Chez Maria, je rencontre un couple de...Français, Caro et Damien, qui sont en tour du monde. On sympathise rapidement et ils m'expliquent qu'ils sont à la moitié de leur aventure, après six mois passés en Amérique centrale et du Sud, et qu'ils partent pour la Nouvelle-Zélande dans moins d'une semaine. Nous décidons d'aller ensemble le lendemain effectuer l'excursion de la réserve des manchots de Humboldt.
Le soir, chacun chez Maria fait sa cuisine dans une ambiance détendue. Je fais la connaissance de Johannes, un Allemand avec qui je partage ma chambre, d'une Espagnole et d'un Canadien avec qui je communique sans même m'en rendre compte tour à tour en français, anglais et espagnol.
La reserva nacional pinguino de Humboldt est située à deux heures de la Serena, et est constituée de trois îles : la Isla Choros, qui abrite les animaux sauvages, la Isla Damas, qui se visite ensuite, et une troisième qui nous restera mystérieuse. Attention aux dénominations puisque le pinguino, en anglais penguin, n'est pas un pingouin mais un manchot en français. Ils vivent dans l'hemisphère Sud et ceux de Humboldt en sont une espèce caractérisée par sa petite taille et par le fait qu'il en resterait en vie seulement douze mille couples.
Depuis Punta de Choros, un bateau nous emmène, les Français et une famille d'Allemands (dont les trois enfants sont trois frères et soeurs adoptés au Chili).
Sur le chemin de l'île, nous avons la chance de croiser quelques bancs de dauphins. Un spectacle enchanteur :
Puis l'Isla Choros se dessine, surgie de la brume. Nous allons la longer doucement.
Tout d'abord de grands rochers sur lesquels se prélassent des lions de mer, dont un gros mâle à la tête d'un vrai harem :
Et qui voilà ? Les manchots, qui se dandinent maladroitement sur les petits rochers qui bordent l'île :
Sur un autre grand rocher, un lion de mer mâle avec un harem beaucoup plus réduit, ce qui ne l'empêche pas de faire son fier. Sur le même rocher, une loutre de mer :
Nous revoyons ensuite un groupe de manchots, une otarie rêveuse et un joli couple de cormorans à pattes rouges :
Cap ensuite sur la Isla Damas, pour se dégourdir les jambes, être horrifiés par les vautours et admirer deux très jolies plages :
Une excursion parfaite en tous points, étant le seul groupe de touristes à la découverte de ces minuscules îles emplies de faune marine, perdues dans la brume du Pacifique.
De retour à la Serena, nous décidons avec Caro et Damien de nous rendre dans la vallée de l'Elqui, où l'on nous promet un ciel dégagé. La vallée est célèbre pour ses plantations de raisin qui donnent naissance au Pisco, l'eau-de-vie locale, dont la paternité se dispute avec le Pérou. Cap donc sur Pisco Elqui, petit village pittoresque dont le nom est récent et a été choisi pour donner du poids au dossier de revendication de paternité...
Nous irons loger chez Gabriela, une amie du frère de Maria (les Chiliens sont des gens de réseau), où nous serons seuls et parfaitement tranquilles pour deux jours et deux nuits.
La vallée est également célèbre pour attirer nombre de hippies. Les amateurs d'énergie cosmique y viennent car selon eux la vallée serait le centre énergétique de la planète et même le point d'atterrissage d'ovnis ! Si si...
En fait d'ovnis, lors d'une nuit de pleine lune, nous aurons la chance inouïe d'assister au spectacle d'une météorite se consumant au moment de sa rentrée dans l'atmosphère. Pas de photos malheureusement, ce fut trop rapide...
Il est temps de rentrer ensuite à la Serena, et d'y attrapper un bus de nuit pour Santiago. Caro et Damien y prendront leur avion pour la Nouvelle-Zélande et de mon côté j'y débuterai ma mission d'enquête auprès de l'ONG Techo.
J'ai mis merveilleusement à profit ces deux semaines et demie entre mes deux missions, et pu admirer des paysages parmi les plus beaux du monde, et cela tout en ayant la chance de pouvoir le partager avec d'autres voyageurs.
Maintenant, au boulot !